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Coulisses du palais - Entretien avec Me Patricia Alexandre

@Photo Les Coulisses du palais, Canal D

Les Coulisses du palais, télésérie présentée les vendredis à Canal D, nous a montré dans le dernier épisode le travail de la procureure Me Patricia Alexandre. Celle-ci doit analyser les dossiers des personnes détenues lors de leur comparution et énoncer à la cour la position de la poursuite quant à leur mise en liberté provisoire ou leur incarcération pour la suite des procédures judiciaires. Cette décision est prise notamment dans le but d'assurer la protection de la société et des victimes.


Question : Le fardeau qui vous incombe pour qu’un accusé demeure incarcéré dans l’attente de son procès est lourd. Lorsque vous n’arrivez pas à convaincre le juge que l’accusé doit demeurer incarcéré, quel est votre sentiment? 

Me Patricia Alexandre: Lors d’une enquête sur mise en liberté provisoire, la majorité du temps, le fardeau repose effectivement sur les épaules de la poursuite. C’est à nous de démontrer à la cour que l’accusé ne peut pas être remis en liberté au regard de l’un des 3 motifs énumérés à l’article 515 (10) C.cr. Nous n’avons pas de cause à gagner, mais nous devons toujours agir dans le but de : 1) protéger la société, les victimes et les témoins 2) trouver un encadrement qui fera diminuer le risque de récidive. 

@Photo Les Coulisses du palais, Canal D

Lorsque nous décidons de procéder à une enquête sur mise en liberté provisoire, c’est que nous sommes d’avis que nous ne disposons pas suffisamment d’éléments nous permettant de remplir notre but de protection de la société. Nous allons donc exposer brièvement le profil judiciaire de l’accusé (ses antécédents judiciaires et/ou causes pendantes s’il en a), les faits au soutien des dossiers concernés, nos préoccupations et les éléments qui militent en faveur d’une détention. 

De son côté, l’accusé pourra se faire entendre pour tenter de rassurer le tribunal du respect des conditions qui pourraient lui être imposées et sur le fait qu’il ne représenterait pas un danger pour la société s’il bénéficie d’une remise en liberté dans l’attente de son procès. 

À la lumière de cette audience, le juge rendra une décision sur la détention ou non de l’accusé. À cette étape, nous aurons le sentiment du devoir accompli, puisque toutes les avenues possibles auront été envisagées avant de remettre la décision finale entre les mains du tribunal. 

@Photo Les Coulisses du palais, Canal D

Q: Arrive-t-il que les prévenus n’acceptent pas les conditions posées par la poursuite? Quelles raisons sont alors invoquées?

PA: Avant de décider de s’objecter à la remise en liberté d’un accusé, le procureur aux poursuites et pénales peut suggérer des conditions qui, de son point de vue, peuvent permettre de s’assurer que les intérêts de tous soient sauvegardés. Toutefois, oui, il arrive que les accusés refusent les conditions proposées. Lorsque nous faisons face à cette situation, nous pouvons soit ajuster la condition pour qu’elle devienne applicable à la situation du détenu, soit la soumettre à la cour pour que celui-ci tranche le débat. 

Il y a toutes sortes de motifs qui peuvent amener un prévenu à les refuser, comme par exemple :

1) Quand nous proposons un dépôt en argent comme garantie et que l’accusé ne dispose pas de cette somme, il lui est donc impossible d’honorer cette condition;

2) Lorsque nous interdisons à un accusé de communiquer avec une personne et que cela implique qu’il ne pourra plus être en contact avec ses enfants;

3) Lorsque nous lui suggérons d’entreprendre une thérapie en lien avec des problèmes de dépendances ou de la gestion de la colère et que de leur côté, ils ne se reconnaissent pas de problématique à cet égard ou ils n’ont tout simplement pas les moyens financiers pour les entreprendre.

@Photo Les Coulisses du palais, Canal D

Q: Quelles sont les qualités les plus importantes d’un procureur en ce qui a trait à l’enquête sur mise en liberté?

PA: Procéder à des enquêtes sur mise en liberté provisoire, dans les salles à volume, n’est pas une tâche évidente. La peur de mal évaluer une situation est toujours omniprésente. Il ne faut pas oublier que la base de notre travail est établie sur des récits vécus par des personnes qui ont été impliquées dans des évènements émotifs qui ont souvent des répercussions sur leur vie. 

Du début à la fin de la journée, nous sommes catapultés dans un tourbillon où nous devons être capables de réceptivité, de sang-froid, d’objectivité et d’adaptation aux divers intervenants de la cour avec lesquels nous devons échanger (les juges, les avocats de la défense, le personnel de la cour). Le sens de l’organisation et de la débrouillardise sont également des atouts, compte tenu du nombre de dossiers traités et des intervenants à rencontrer.  Comme vous pouvez le constater, le rôle du procureur en est un emballant, mené par des personnes passionnées et passionnantes qui aiment les débats et les échanges et qui n’ont pas peur d’aller au front pour les convictions auxquelles ils adhèrent!


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