La fabrication de faux documents : une infraction criminelle

 



Le Code criminel prévoit des infractions spécifiques pour la fabrication et l’utilisation d’un faux document. 

Patricia Johnson, procureure aux poursuites criminelles et pénales


Qu’est-ce qu’un document au sens du Code criminel? 

Selon l’article 321 du Code criminel, un document est un papier, un parchemin ou autre matière sur lesquels est enregistré ou marqué quelque chose qui peut être lu ou compris par une personne, un ordinateur ou un autre dispositif. Une carte de crédit est également considérée comme étant un document au sens du Code criminel. La définition s’applique donc à un permis de conduire, une carte d’assurance maladie ou encore au passeport vaccinal par exemple.



Qu’est-ce qu’un faux document au sens du Code criminel ? 


Toujours selon l’article 321 du Code criminel, un faux document est :  

  • un document dont la totalité ou une partie importante de celui-ci est donnée comme ayant été faite par ou pour une personne : 
    • qui ne l’a pas réellement faite ou n’a pas autorisée qu’elle soit faite;  
    • ou qui en réalité n’existait pas;  
  • un document qui a été fait par ou pour la personne qui paraît l’avoir fait, mais qui est faux sous quelque rapport essentiel. C’est-à-dire un document qui est contraire à la réalité (Directeur des poursuites criminelles et pénales c. Richard). Par exemple, il pourrait s’agir d’un relevé d’inventaire attestant de renseignements qui ne sont pas conformes à l’inventaire réel 
  • un document qui est fait au nom d’une personne existante, par elle-même ou sous son autorité, avec l’intention frauduleuse qu’il passe comme étant fait par une personne, réelle ou fictive, autre que celle qui le fait ou sous l’autorité de qui il est fait.  

 La définition se trouvant à l’article 366 (2) du Code criminel est complémentaire à celle qui se trouve à l’article 321.

 

Selon la définition de l’article 366 (2), faire un faux document c’est :  

  • l’altération d’un document authentique ou d’une partie essentielle d’un tel document;  
  • une addition essentielle ou l’addition d’une fausse date, attestation, sceau ou autre chose essentielle à un document authentique;  
  • une altération essentielle dans un document authentique, soit par rature, oblitération, enlèvement ou autrement.  

 On entend par essentielle, une partie ou mention nécessaire qui fait en sorte que le document ait la portée, l’utilité, pour lesquelles il a été créé.

  



Qu’est-ce que la fabrication de faux documents? 


L’infraction relative à la fabrication d’un faux document est prévue à l’article 366 du Code criminel. La peine est prévue à l’article 367 du Code criminel. Une personne déclarée coupable de cette infraction peut se voir imposer jusqu’à 10 ans d’emprisonnement.  

 

L’infraction de fabrication de faux est une infraction d’intention spécifique. Cela signifie que le procureur aux poursuites criminelles et pénales doit prouver devant le tribunal que le suspect accomplissait la falsification du document avec une certaine intention.  

 

Une personne commet l’infraction de fabrication de faux lorsqu’elle fait un faux document le sachant faux et avec l’intention :  

  • qu’il soit employé ou qu’on y donne suite, de quelque façon, comme document authentique, au préjudice de quelqu’un au Canada ou à l’étranger.  
  • d’engager une personne en lui faisant croire que le document est authentique, à faire ou s’abstenir de faire quelque chose au Canada ou à l’étranger.   

Par exemple, une infraction serait commise si une personne produit un faux relevé de paie pour obtenir un prêt dans une institution bancaire ou qu’elle fait une fausse carte d’identité. Il en serait de même si une personne endosse un chèque fait à l’ordre d’une autre personne en signant avec le nom de cette personne.  

 

Le procureur doit prouver hors de tout doute raisonnable devant le tribunal : 

  • que le document est faux; 
  • que l’accusé savait qu’il faisait un faux document; 
  • que ce dernier avait l’intention spécifique que le faux document soit utilisé pour porter préjudice à autrui.  

 Toutefois, il n’est pas nécessaire qu’un préjudice ait été causé dans les faits. Seulement l’intention qu’un préjudice soit causé doit être présente (R. c. Ferland et R. c. Laroche). 

 

L’infraction relative à l’utilisation de documents contrefaits est prévue à l’article 368 du Code criminel. Il s’agit d’une infraction distincte.  

 

Une personne qui est trouvée coupable de cette infraction est passible d’une peine d’emprisonnement maximale de 10 ans. Il n’est pas nécessaire que la personne ait produit elle-même le faux document pour être trouvée coupable d’utilisation de documents contrefaits.  


Sources : 

Annie-Claude Bergeron et Catherine Dumais, « Les infractions criminelles » dans École du Barreau du Québec, Droit pénal - Infractions, moyens de défense et peine, Collection de droit 2021-2022, vol. 13, Montréal (Québec), Éditions Yvon Blais, 2021, 73 pages.