Les éléments essentiels d’une infraction




Dans toute poursuite criminelle, la procureure ou le procureur aux poursuites criminelles et pénales doit convaincre la juge, le juge ou le jury que la personne accusée est coupable hors de tout doute raisonnable du crime qui lui est reproché. Peu importe le crime, la poursuite doit prouver les éléments essentiels constitutifs de l’infraction.

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Ces éléments essentiels constitutifs de l’infraction appartiennent à l’une ou l’autre des catégories désignées par des locutions latines. Il s’agit soit d’un élément se rattachant à l’actus reus ou à la mens rea.


Actus reus

Selon le Dictionnaire de droit québécois et canadien, l’expression actus reus fait référence à « l’acte coupable ». Il s’agit de « l’acte ou du comportement conscient et volontaire d'un individu qu'une loi pénale prohibe et sanctionne. Il constitue l'élément matériel d'une infraction criminelle¹ ».

 Il s’agit donc du geste que la personne accusée a posé.

 Il pourrait s’agir, par exemple :

  • d’un coup de poing donné à une autre personne, ce qui peut constituer des voies de fait en vertu du Code criminel.
  • d’endommager un bien, en fracassant la fenêtre d’un immeuble, ce qui peut constituer un méfait au sens du Code criminel.

 

Mens rea

L’expression mens rea, pour sa part, signifie « l’intention coupable ».

Selon le Dictionnaire de droit québécois et canadien, la mens rea désigne la conscience qu'a un individu de commettre un acte prohibé par la loi ou son insouciance à l'égard des conséquences d'un acte qu'il pose. Il s’agit de l’élément moral de l’infraction.

Le Code criminel prévoit 3 catégories de mens rea.


L’intention de la personne qui commet un acte criminel

Il existe 2 types d’intention, soit l’intention générale ou l’intention spécifique.

Pour les crimes d’intention générale, par exemple des voies de fait simples, l’élément moral est la perpétration de l’acte illégal, donc de donner un coup de poing. La personne qui donne un coup de poing n’a pas besoin d’avoir l’intention de blesser l’autre personne pour avoir la mens rea requise par l’infraction.

Elle doit seulement avoir eu recours intentionnellement à la force, autrement dit, fait volontairement le geste.

Pour les crimes d’intention spécifique, la personne désire atteindre un but particulier supplémentaire². Par exemple, pour l’infraction de contacts sexuels, le procureur doit prouver l’intention spécifique de l’agresseur, c’est-à-dire que l’agresseur s’est livré à un attouchement à des fins d’ordre sexuel, qu’il recherchait une certaine gratification sexuelle lors du geste. 


L’insouciance ou l’aveuglement volontaire

Il s’agit de l’insouciance ou de l’aveuglement volontaire de la personne à l’égard des conséquences d’une action qu’elle pose. 

On pense ici à de l’insouciance lorsque la personne est consciente que « sa conduite risque d'engendrer le résultat prohibé par le droit criminel, [et qu’elle] persiste néanmoins, malgré ce risque³»

La personne est alors insouciante à l’égard des conséquences d’une action qu’elle pose et qui entraîne des conséquences criminelles. 

On fait référence à de l’aveuglement volontaire lorsqu’une personne omet de se renseigner, car elle ne veut pas connaître la vérité. La personne va alors préférer fermer les yeux sur les possibles conséquences.


La négligence pénale 

La négligence pénale fait référence au concept d’intention objective.  Elle « se définit comme un écart marqué par rapport à la conduite d'une personne raisonnablement prudente»

Par exemple, dans le cas d’une infraction de conduite dangereuse, le juge doit se demander si la manière de conduire de la personne accusée était objectivement dangereuse pour le public et si elle constituait un écart marqué par rapport à la norme, par rapport à la conduite d’une personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances.

Lors d’un procès criminel, le procureur pourra faire la preuve des éléments essentiels d’une infraction de différentes façons. Par exemple, il pourra :

  • faire entendre des témoins devant le tribunal (preuve testimoniale);
  • déposer des relevés bancaires (preuve documentaire);
  • présenter l’arme du crime (preuve matérielle).  


Annie-Claude Bergeron et Catherine Dumais, « Les infractions criminelles » dans École du Barreau du Québec, Droit pénal - Infractions, moyens de défense et peine, Collection de droit 2021-2022, vol. 13, Montréal (QC), Éditions Yvon Blais, 2021, p.73.

3 Idem.

4 Idem.

R. C. Morin 2021 QCCA 397.