DCOM et Me Geneviève Bélanger,
procureure aux poursuites criminelles et pénales au bureau de Montréal
Des
stratagèmes variés pour tromper les victimes
Il existe plusieurs types de fraudes visant les aînés. Ils portent différents noms, selon le scénario inventé et la personne qui a commis la fraude.
Pour qu’un dossier se rende au DPCP, il faut d’abord qu’une plainte soit déposée à la police. Même si la personne victime ne veut pas entamer de démarches judiciaires, le procureur peut déposer des accusations et mener à terme les procédures, si la preuve est suffisante.
« On a affaire à des grands-parents qui ne veulent pas dénoncer leur enfant, leur neveu ou leur petite-fille, ou encore à des aînés qui ont des pertes cognitives. Notre objectif, c’est de protéger les personnes aînées et vulnérables et de dissuader les accusés de récidiver », explique Me Geneviève Bélanger, procureure aux poursuites criminelles et pénales, spécialisée dans les crimes économiques envers les personnes aînées et vulnérables à Montréal.
Des peines qui varient
Les fraudes envers les personnes aînées ou vulnérables sont nombreuses au Québec et les procureurs doivent sans cesse s’adapter à l’évolution des stratagèmes criminels. Contrairement à d’autres types de crimes où la jurisprudence en matière de sentences abonde, les fraudes envers ces victimes se règlent souvent dans le cadre de suggestions communes.
Dans
le contexte de fraudes envers des aînés, la reconnaissance de culpabilité peut
être favorisée par les parties afin d’éviter des procès longs et éprouvants, en
particulier pour des victimes vulnérables. Les suggestions communes
résultent d’une évaluation rigoureuse. Le procureur doit examiner les
circonstances propres de chaque affaire à la lumière du cadre légal applicable,
dont les directives du DPCP.
« Compte tenu du type de preuve recueillie en matière de crimes économiques, par exemple la preuve documentaire ou des images captées dans les institutions financières, il est plus commun d’obtenir des reconnaissances de culpabilité. Cela bénéficie aux victimes vulnérables afin qu’elles n’aient pas à subir l’épreuve du témoignage dans le cadre d’un procès. » - Me Geneviève Bélanger, procureure aux poursuites criminelles et pénales
Les
peines imposées aux accusés varient selon la nature et la gravité de la fraude.
Le Code criminel prévoit que l’abus envers une personne aînée ou vulnérable
constitue un facteur aggravant dans la détermination de la peine.
Voici quelques exemples récents de peines imposées dans le cadre de suggestions communes dans la grande région de Montréal et qui illustrent le poids accordé à la dissuasion et à la dénonciation.
- Sébastien Doyon a fraudé ses parents atteints de troubles cognitifs pour plus de 9 000 $. Il a plaidé coupable en 2024 et a reçu une peine de six mois d’emprisonnement dans la collectivité avec des conditions strictes, suivie de deux ans de probation, avec remboursement intégral des victimes. Ses sœurs l’avaient dénoncé, mais ne voulaient ni procès ni prison pour leur frère.
- En 2024, Carl-René Moody, impliqué dans une fraude de type faux représentant ayant fait 27 victimes aînées, a été condamné à 23 mois d’emprisonnement. Il a également dû rembourser 80 000 $.
- En 2025, Yannick Mercier, qui se faisait passer pour un agent de la GRC pour frauder des aînés, a été condamné à trois ans de détention, avec une ordonnance de remboursement.
- Yani Noël, impliqué dans une fraude de type faux représentant visant 33 victimes aînées pour un total de 125 000 $, a reçu une peine de 30 mois de détention en 2022.
La
réparation des torts : un enjeu crucial
Si
l’un des objectifs principaux est la dénonciation de ces crimes, la réparation
des torts causés aux victimes est tout aussi importante. Les procureurs
s’efforcent d’obtenir le remboursement des sommes volées. Dans plusieurs cas,
les banques indemnisent les victimes, mais, lorsque ce n’est pas le cas, la
poursuite demande que l’accusé rembourse directement la victime. L’accusé devra
aussi rembourser la banque lorsque cela est possible.
Lorsqu’un
remboursement est inclus dans la sentence, cela permet de reconnaître le
préjudice subi et d’aider la victime à retrouver une certaine stabilité
financière. Cependant, il n’existe pas de loi obligeant systématiquement les
fraudeurs à rembourser.
Certaines
victimes aînées ou vulnérables peuvent hésiter à porter plainte, par honte ou
par peur de dénoncer un proche. L’important est de trouver un équilibre entre
la sanction, la réparation et la prévention de récidive, afin de protéger les
personnes les plus vulnérables de la société.
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