Juridiction territoriale : quand un crime dépasse les frontières

Un procès exceptionnel pour terrorisme s’est récemment conclu devant la Cour supérieure du Québec, au palais de justice de Québec. L’accusé a été reconnu coupable d’avoir planifié des actes terroristes visant le gouvernement d’Haïti à partir de Lévis. Mais pourquoi la justice canadienne a-t-elle pu le poursuivre et le juger ici? La réponse repose sur un principe fondamental du droit criminel : la juridiction territoriale.

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Lorsqu’un crime met en jeu plus d’un pays ou qu’il a été commis dans une zone ambiguë, comment déterminer quelle juridiction a compétence pour juger l’affaire? Pour répondre à cette question, il faut analyser plusieurs éléments, dont la compétence territoriale. Il doit exister un lien de rattachement suffisant entre l’infraction et le territoire où elle est poursuivie.

Ce lien peut être établi de plusieurs manières :

Un exemple concret 

Dans le cas du procès pour terrorisme à Québec, l’accusé achetait du matériel et faisait des publications  sur les réseaux sociaux à partir de Lévis, ce qui crée un lien territorial suffisant pour justifier des accusations au Canada. Si l’accusé avait été arrêté en Haïti, ce pays aurait aussi pu décider de le juger, mais, comme il a été interpellé par la Gendarmerie royale du Canada (GRC) sur le sol canadien, la justice canadienne a pu poursuivre l’affaire.

Dans la grande majorité des cas, c’est le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) qui est responsable de l’application du Code criminel et des lois pénales québécoises sur le territoire de la province. 

Cependant, pour certaines infractions spécifiques, comme en matière de terrorisme, c’est le poursuivant fédéral qui prend en charge l’affaire. 

Après le rattachement avec le pays et la province, il y a aussi le rattachement au  district judiciaire. En principe, toute infraction doit être jugée dans le district judiciaire où elle a été commise. Dans le cas du procès pour terrorisme, celui-ci a eu lieu au palais de justice de Québec, car l’accusé a commis une partie des gestes délictuels à partir de la ville de Lévis.   


Double compétence et entraide judiciaire

Un crime peut parfois être jugé dans plus d’un pays. Si un fraudeur canadien appelle des victimes depuis Montréal et depuis New York, le Canada et les États-Unis peuvent chacun le poursuivre. Cela peut mener à des discussions entre pays afin de déterminer lequel entreprendra la poursuite.

Le Canada collabore aussi avec d’autres pays grâce à des accords d’entraide juridique. Par exemple, un corps de police québécois peut solliciter l’assistance du FBI afin que celui-ci l’appuie dans une démarche d’enquête concernant un suspect aux États-Unis. 

La juridiction territoriale est un concept qui permet de s’assurer que les crimes sont jugés dans un cadre logique et équitable. Dans la grande majorité des cas, la compétence territoriale est évidente. Cependant, certaines affaires – comme celles impliquant des infractions transnationales – nécessitent une analyse plus fine des faits. Le but est toujours de garantir qu’un crime ne reste pas impuni, peu importe où il a été commis.

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